Sans domicile fixe
J'ai écrit ce poème, parce que très jeune, j'ai lu un roman d'Elsa Triolet, "Ecoutez-voir", dont l'héroïne m'a poursuivie. Je devrais le relire, ou lire le triptyque, puisqu'il fait partie d'un ensemble de romans. Veuve, Madeleine Lalande se clochardisait complètement. La tentation, la fascination, l'angoisse de la clochardisation, du sans domicile fixe, de la pauvreté totale, c'est quelque chose que je ressens, qui pourrait être moi.
De plus, l'avant-dernier texte de Coumarine m'y ramenait aussi. Nos écrits passeront, les SDF resteront, hélas. Et puis, des SDF, j'en ai vu. Et regardé sans appuyer. Pas seulement dans les rues commerçantes, mais dans un espace ouvert à tous vents, en même temps, dans une encoignure de la Fortis Banque, rue Royale. A Paris, dans des dédales d'escaliers de parkings.
Et aussi parce que j'en ai vu un jour un autre, réduit à l'état de cendres, que des jeunes avaient brûlé vif, en plein jour, en plein Paris.
***
Insensiblement
Il me vient le découragement
D'aller et de venir
Arrêter
M'asseoir
M'étendre sur une couverture
Avec un tas de cartons ou de journaux
sur un trottoir, près d'un parc
De bric ou de brac
Froid ou chaud que m'importe !
et dans un sac de couchage
j'attendrais
Que ne viendraient jamais
Tous ceux qui m'ont abandonnée
Indifférents
Ils poursuivent leur vie
Leurs jeux leurs chansons
Leurs promenades au bord de la rivière
Et l'amour ?
"Bien sûr tout le monde veut l'amour
Ah! Toi tu veux tout le temps l'amour !"
Ah ! Je le voulais, l'amour ...
Mais je sais bien que je ne l'aurai pas !
La femme éphémère. Plage d'Audresselles, 19.09.2008