C'était...
Il y a vingt ans, oui, vingt ans. Mon fils avait 8 mois et j'avais l'impression de porter...
1) ma vie professionnelle à bout de bras;
2) mon mariage à bout de bras;
3) et cette famille à bout de bras.
Je rêvais parfois (rarement) de mains dans lesquelles je pourrais déposer ces fardeaux bien lourds. Mais il n'y avait point de main tendue. Donc, j'ai continué à tout porter, à rentrer la tête dans épaules, à raffermir mes épaules (au point de faire un geste machinal, comme si je voulais redresser une charge sur mon dos)
Finalement, je prenais sans doute trop sur moi. A quoi ça servait de vouloir porter quelque chose d'importable? Enfin, d'insupportable ?
J'y pensais parce qu'en rentrant de la séance de croquis ce soir (je souffre, et puis le crayon décolle...) je me disais que j'étais folle. Courir comme ça, dans Bruxelles, la nuit... Alors que je pourrais passer ma vie tranquilos, à je ne sais pas faire quoi, pas du tricot, la laine et les aiguilles ne m'ont jamais supportée... Pas plus les ouvrages de dame.
A regarder la télé peut-être, Julie Lescaut, ou Une femme d'honneur, à la rigueur, Navarro, mais pas pour Roger Hanin. Toutes ces femmes ont pour particularité d'arriver à porter les responsabilités d'un commissariat ou d'une gendarmerie, d'enquêtes sur des meurtres, une famille monoparentale, et des enfants en crise d'adolescence. Et ! En plus ! (Je ne sais pas comment elles ont fait !) Elles ont un nouvel homme dans leur seconde vie. Qui se plaint souvent de ne pas les voir assez (ce n'est pas logique, ça, en général, ils trouvent qu'ils nous voient assez et que c'est nous qui voulons trop...)
Je me suis dit que j'aimerais bien trouver deux mains tendues, m'asseoir, et déposer mon fardeau - non pas dans les mains de l'autre (il n'a rien fait pour mériter ça...) mais à mes pieds et simplement profiter d'un moment de calme, de chaleur et d'affection. Cesser d'être une battante, ou plutôt, laisser la guerrière se reposer un peu, à la lumière de sentiments, (qui, pour une fois, seraient partagés).
D'autant que tout de même, j'aime plutôt bien la vie à deux. (Ca a des bons côtés je trouve! Des moins bons aussi). Mais apparemment, je suis la seule à trouver ça. Enfin, disons que ces cinq dernières années, je suis visiblement la seule à trouver ça: que ça a des bons côtés.
J'ai même un jour discuté sur Internet avec un type (un drôle de type) que j'avais croisé, des années avant, dans la "vraie vie" comme on dit. (Même qu'il écrivait des poèmes). Son pseudo était Dieu (authentique). Il était veuf, avait une compagne (ça je l'ai su par quelqu'un d'autre), mais il proposait des massages à toutes les nanas. J'ai poliment décliné son offre et l'ai laissé me vanter les mérites du massage et de la nudité, en me disant que j'aurais préféré ne jamais le "revoir" (fût-ce virtuellement).
("Encore un malade" me suis-je dit dans mon moi-même...)
Bon, ben, en attendant, mieux vaut rien qu'un malade, et faute de mains tendues et de divan confortable, je vais rejoindre mon lit, où vont s'installer les trois chats - mes trois gardiens du temple... Mais bon, la conversation est un peu limitée, même si, pour le principal, on se comprend. (Et si j'en juge par Félix, j'ai même pas besoin de lui dire où je vais, il le devine d'office...)