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Mes carnets
8 novembre 2006

Moments de peinture...

Un coup de barre. (...) Et ça repart.

Je suis retournée au cours du soir, (non sans m'être lestée, auparavant, d'une crêpe cassonade et d'un vigoureux capuccino). Le miroir sur le chevalet était toujours en place, j'ai pris une nouvelle feuille, rempli mon bol d'eau, et en avant. Cette fois, ce n'était plus vraiment un autoportrait, c'était une scène d'atelier, à travers le miroir. Ma voisine, penchée sur sa table, en train de s'essayer à un (Dali? C'est possible? Je n'ai pas très bien vu...) à l'arrière plan, les chevalets en enfilade, et moi, sujet peignant, en avant-plan sur la gauche de la feuille.

Intéressant, intéressant, estime le prof: et les recommandations d'usage fusent:
"ne bouchez pas trop votre peinture",
"sachez vous arrêter à temps", "le plus difficile est de s'arrêter à temps",
"le départ est meilleur que pour le précédent",
"l'avant-plan et la profondeur en arrière sont intéressants",
"construisez le visage"...
"Construisez le visage" ! Il l'avait pourtant bien dit...

Et à la fin du cours: "Le visage est trop construit, trop architecturé, vous auriez dû l'esquisser, comme pour le reste" -
"c'était intéressant les esquisses, maintenant, c'est trop peint",
"et le bleu, il est trop bleu, à certains endroits",
"ce bord-là, vous pouvez l'enlever", et ça... et ça... et ça...

Il avait raison, dans la veste bleue, il y avait trop de bleus différents, qui ne "coulaient" pas les uns dans les autres.
J'avais le vertige.
J'étais pliée en deux de mal (ça ne s'améliore pas!) et je me demandais comment j'allais rentrer chez moi.

Ce soir, de nouveau pleine d'espoir, ma voisine m'a demandé si j'allais peindre mes lunettes, cette fois, j'ai répondu non, très calmement, avec l'envie de dire, "c'est ça, et je peins mes boutons avec, et la couperose, et les cicatrices d'opérations, et la cage en titane de la nuque, le morceau de sein en moins, bref, tout ce qui est parfaitement anecdotique".
Je fais pas le portrait de Dorian Gray, crotte à la fin !

Et puis bien sûr, le dial entre élève 1 et élève 2 (et moi au milieu) :

Elève 1 (qui me voit à l'oeuvre cette fois)... "Tout ça en deux heures, moi je ne saurais pas!"
Elève 2 (qui répète ce qu'elle a déjà entendu, sans réfléchir)... "Oui, mais à l'acrylique, c'est facile..."

Mais d'où leur vient cette idée fixe que

"l'acrylique-c'est-facile" !?!

Parce que cela sèche en deux heures au lieu de 15 jours ?
Je n'ai jamais entendu dire ou constaté que l'acte de peindre soit plus facile avec l'une ou l'autre technique: acrylique, tempera, huile, aquarelle, peindre, c'est difficile, (mais intéressant), point barre.
Peindre, c'est un boulot et un boulot physique. Re-point barre.
C'est une passion, un travail qui exige des années d'études et de pratique, une vision acérée, une disponibilité totale, une formation continue, un travail de tous les instants, que l'on manie un pinceau chargé d'acrylique ou d'huile, ou trempé dans de l'aquarelle.
Ou plus "simplement", des pastels, du fusain et du bâton à estomper.

Dessiner, c'est difficile. Même si on adore ça.
Ecrire, c'est aussi difficile, quand on veut porter son écriture à un degré certain de qualité.
Et la musique, l'architecture, le cinéma, la sculpture, l'artisanat, c'est difficile.

Les techniques diffèrent, c'est tout. Il n'y en a pas une qui soit plus facile qu'une autre, les temps de travail diffèrent certes, (comme écrire au crayon et écrire avec une plume de calligraphe ne demandent pas le même investissement en temps, mais l'acte d'écrire, lui, est le même).

Le prof a certainement dû encore "relever", dans son commentaire, l'une ou l'autre chose "anecdotique", les profs de dessin et les peintres que j'ai connus "plaçaient" tous ça, un moment donné, dans leurs avis (je dis bien, ceux que j'ai connus, je ne veux pas dire par là que tous le disent!) - on en riait même parfois.
Et finalement, alors qu'il ne restait à peu près rien de ma peinture (si ce n'est que tout était à refaire, alors qu'une demi-heure avant, il fallait m'arrêter), il m'a demandé avec inquiétude si ça allait, si je n'étais pas complètement découragée... Ah! Ah! Ah!

Découragée, je ne l'étais pas, non, seulement épuisée. Je suis plutôt de bonne disposition, et toujours volontaire pour apprendre et m'améliorer. "Quand M-F. veut, elle peut" disaient toujours mes instits.
Encore une phrase toute faite... Soit.
J'ai coupé les bords en trop, en me disant que ce serait déjà ça que je ne devrais plus peindre, j'ai nettoyé bols, pinceaux, etc. Et je suis rentrée, en vacances pour deux jours (je ne sais pas si j'irai vendredi, je devrais y aller à raison de 3 soirs par semaine - de toute façon, le mercredi, peut-être le vendredi, et un samedi sur deux. Voilà qui serait honnête...

Je suis rentrée en me traînant, pareille à un blog, pardon, un bloc de béton friable, qui va casser ou tomber à la moindre poussée, j'ai avalé ibuprofène et dafalgan aussi sec, et massé longuement bras, épaules, coudes, tête et nuque, avec des crèmes, onguents, huile, etc. Non sans avoir fait, encore! Du ménage auparavant...

Je devais abominablement grimacer, ce qui n'aurait pas manqué de faire ricaner certaine personne de ma connaissance, (Mme Ex-copine, (pour ne pas la nommer), considérant qu'elle seule était apte à vivre la douleur physique, et à en parler, mais que les autres n'y connaissaient rien, non-non! Ou alors, psychologisme facile, c'est parce qu'ils étaient emplis d'une colère rentrée...). Parfois, le snobisme du "moi, je sais, moi je connais, et toi tu ne sais pas" s'étend à tout et n'importe quoi - mais... Passons, tâchons d'oublier nos griefs envers Mme Ex-copine, et son psychologisme de pacotille, même si je ne les oublie pas toujours. (Mais qu'est-ce que ça fait du bien de se "lâcher"!)

De toute façon, l'épaule sous les noyaux de cerises bien odoriférents, j'ai un peu dormi, et me voilà à nouveau éveillée... Prête à retourner demain ? Noooon.

Demain,  place à SPILLIAERT !

28spilliaert02


20061027_020

MF, 2005.

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Commentaires
G
Vous parlez trés bien de la peinture, de cette expérience chaque jour renouvelée, de cette remise en question permanente inhérante à toute forme d'art. Maitriser la technique quelle qu'elle soit est certe difficile, mais ce qui l'est davantage c'est de pouvoir s'en servir pour toucher quelque chose d'universel et d'émouvant. Il ne s'agit pas de faire un numéro de claquettes devant une assemblée, mais de proposer des réponses à votre propre questionnement avec franchise. Si vous ètes sincère l'oeuvre tiendra le coup. Si la technique freine votre envolée, bossez encore !! jusqu'à ce que vos yeux voient ce que votre âme perçoit, jusqu'à ce que votre main comprenne le geste, le rythme. Si vous ne vous sentez pas à la hauteur de votre ambition, cherchez les réponses en vous. L'imposture et la complaisance n'ont pas leur place dans l'art.<br /> Bon courrage
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