Réflexions en veux-tu, en voilà

Les élections législatives belges approchent. Le 10 juin, on passe aux urnes.

En 99, l'ex CVP (christelijke volks partij - homologue néerlandophone du PSC, parti social chrétien), a été écarté du pouvoir. Dehaene s'en allait caracoler sous d'autres cieux et l'ensemble des cathos (politiques s'entend) entrait dans l'opposition et commençait sa cure de jouvence. Vont-ils sortir du placard à nouveau? Avec un train CD&V piloté par un Y. Leterme? C'est un peu ma préoccupation, mon souci actuel. Je trouve que la croyance et la foi ne devraient concerner que des questions de texte, de croyance et de foi, et là, oui, là, je suis totalement laïque.

Donc, à l'époque, on a applaudi au changement. J'étais un peu dubitative. A tort. Je ne voyais que l'aspect socio-économique des choses. Ou politique (politique pur... De la chose politique).

Car, force me fut de reconnaître que bien des dossiers relatifs à la vie civile ont spectaculairement avancé:

AVANT: en 1986, les enfants naturels n'étaient tout simplement pas reconnus et les procédures d'adoption étaient très compliquées. La Belgique - gouvernée par des majorités tour à tour chrétienne/socialiste ou chrétienne/libérale - a été condamnée à la Cour des Droits de l'Homme de Strasbourg pour sa législation rétrograde sur les enfants naturels. La loi a été abrogée en 1987 - avec effet rétroactif. Il était temps.

Je ne rappellerai même pas (façon de parler, si, je le rappelle), le vote de la loi sur la dépénalisation de l'avortement, en 1990, loi à laquelle, en son âme et conscience, Baudouin Ier s'est opposé. On a dû donc faire jouer une "impossibilité de régner", pendant 36 heures, - le temps de faire passer la loi.

APRES: on assiste à la dépénalisation de l'euthanasie, à une législation et un cadre rigoureux pour cette loi encadrant un acte qui n'est pas à l'opposé des soins palliatifs, à mon sens. Et qui reste de toute façon le choix du patient. On en avait beaucoup discuté dans la laïcité, avec les interventions de maints experts.
La facilitation du divorce (dont on parle depuis le début de l'Arc-en-ciel, je suis bien placée pour m'en souvenir...) va seulement trouver son aboutissement en 2007 - normalement, avant la fin de la législature. Il y aura sûrement des divorces moins longs, moins douloureux, mais je pense que les procédures concernant le partage et/ou la liquidation de biens communs seront toujours aussi longues et pénibles.

Le contrat de cohabitation légale est aussi un progrès, à mon sens, car il concerne tout le monde. Quant au mariage homo, je ne me sens absolument pas concernée - mais j'estime que si ça donne un cadre légal à des formes de vie commune, pourquoi pas ? Quant à l'adoption par les couples homos, je l'approuve en ce sens qu'elle donne aussi un cadre légal à des situations de parentalité qui existent depuis longtemps. Et qui continueront d'exister n'en déplaise à ... Je ne sais pas si c'est une majorité des personnes qui s'y est opposée ou une minorité, mais tant pis. C'est.

Bon, on pourrait redire beaucoup du côté du social... La situation ne s'améliore pas vraiment. Notamment en matière de chômage. Le contrôle est aléatoire et fait plus de tort que de bien en ce sens qu'il peut malmener des personnes qui n'ont pas demandé à perdre leur emploi, et qui pourraient parfaitement trouver du travail si la situation économique n'était pas ce qu'elle est. Une foire d'empoigne... Les R.A.E. (recherche active d'emploi) me laissent un peu sceptiques. Utiles quant à la détermination (c'est toujours bon de revenir sur ses capacités et ses passions), permettent-elles de trouver réellement du boulot (quand mathématiquement, il y en a moins que de demandeurs d'emploi) ? Peut-être que oui quand elles redonnent du peps et du courage à des chercheurs/demandeurs d'emploi passablement découragés. Sinon, hum-hum.

Je ne sais pas si les affaires ont été proprement réglées... Réglées, oui. Mais nettoyées en profondeur? On a tout de même fait la lumière sur les enlèvements d'enfants. Pas mal de cadavres (encore...) datant de l'après Congo (comme l'assassinat de Lumumba) ont été élucidés par la commission Lumumba. Mais bien entendu, on n'a jamais pu faire la lumière totale sur l'assassinat de Cools, ni sur les tueries du Brabant. (Alors que les CCC avaient été relativement vite arrêtés et incarcérés). On en est toujours réduit à des conjectures et certains se sont tus, qui allaient fouiller là-dedans... Même quand ce n'était pas très bien vu de fouiller dedans. Je me souviens aussi du meurtre d'un vétérinaire, chargé d'une inspection sanitaire sur les farines distribuées aux animaux d'élevage... Dont je me demande si elle a jamais vraiment été élucidée.

Et puis, quelle que soit la majorité en place, je ne suis pas d'accord avec le principe des lois-programme. Vincent Decroly député indépendant, m'en avait parlé de façon très claire et très intéressante, lors d'une interview. Déjà qu'on n'est pas vraiment dans la démocratie participative, alors, si l'exécutif fait pencher la balance politique en sa faveur, avec l'émission de lois-programmes... Difficiles à digérer par les parlementaires. On nous l'a assez répété à l'école. Le vote sanctionnait peut-être les politiques...

Mais la lenteur de la Loi était sa meilleure garantie. Bref.

En clair, je n'ai pas envie de voir revenir certains partis au pouvoir, Je n'ai pas envie de voir le pays s'enfoncer à nouveau dans la logique des piliers et des lobbies (même s'ils n'ont jamais cessé d'être actifs), en conclusion, je suis fort perplexe quand j'envisage les élections du mois de juin.

Que nous restera-t-il, après ?

De ce fait, la campagne présidentielle française acquiert beaucoup de "charme", en même temps qu'elle inquiète. Si la France se retrouve, à la veille du 6 mai avec un duo genre Sarkozy/Le Pen, qu'est-ce que les Français vont faire? (Il y a encore la possibilité Sarko/Ségolène R. plus crédible), oui, mais voilà, il y a aussi le troisième larron, F. Bayrou.

Un jour que je visitais des pages du site web du parti sarkozien, sur le conseil d'une copine du web, (j'ai jamais très bien compris ce qui lui avait pris), je suis restée effarée. Ca rendait un son de droite vraiment de droite, simpliste à l'extrême, avec tous les tintouins relatifs à la sécurité et au reste... Les sirènes du sécuritisme à tout crin. De fait, je sais aussi qu'entre soi, pas mal de personnes admettraient assez bien le retour de la peine de mort. Or, si on l'a supprimée, je considère que c'est un progrès humain, entériné par une loi. Par conséquent, il ne peut y avoir d'exceptions, ni de remises en question.

C'est surtout ça ma conclusion: je n'ai pas envie d'assister à une régression. Les droits acquis ne le sont pas toujours. (On le voit en matière de droits sociaux). On peut être contemporain de progrès fulgurants. Mais la résistance existe de façon latente et les progrès enregistrés tiendront-ils toujours la route? Je l'espère du fond du coeur. En bonne humaniste que je suis (ça au moins, je le sais...)

Voil un post (une "entrée", c'est plus meilleur beau, littérairement parlant!) pas vraiment artistique, non, mais bon, ce sont aussi mes préoccupations (et le résultat, approximatif, bien que je sois allée vérifier pas mal de petits faits de politique belge avant de publier), de mes cogitations du moment...

Comments

[nuages]

C'est vrai que depuis 1999 la Belgique a connu des changements politiques positifs. Rien de miraculeux dans le domaine économique et social, c'est vrai, mais dans le domaine politique, éthique, culturel au sens large, un vent nouveau a soufflé.
C'est devenu un pays en pointe sur bien des sujets.
Mais en même temps, la politique belge reste peu passionnante à mes yeux, je reste plus intéressé par ce qui se passe en France, ou en Italie, en Espagne, etc...
Je vois arriver ces élections du 10 juin avec appréhension : succès possible des chrétiens-démocrates flamands, confédéralistes, durs sur le plan communautaire, succès possible aussi du Vlaams Belang. Difficulté pour constituer un nouveau gouvernement, retour possible du poison communautaire (scission de Bruxelles-Hal-Vilvorde, de la sécurité sociale...). Confidence ? Je voterai vert comme d'habitude, par conviction mais sans illusions excessives...