Molière (2)
J'avais vu l'affiche sur une pub... Sur un tram qui passait...
"Tilt" - ça a fait "tilt", je me suis dit: "un film sur Molière?"
Un film sur Molière... Etait-ce possible ? Il m'a fallu le temps d'y repenser, de faire ma recherche sur Internet, de voir où ça se jouait et si ça se jouait encore (les films ne font que passer, leur carrière est brève, surtout s'il n'y a pas un gros succès de foule ou commercial), de connaître les comédiens, ce que ça racontait... Ma foi, les bandes annonces ont quelque chose de frustrant, c'est ça et ce n'est pas ça en même temps.
Et puis, que pouvait-on encore tourner sur Molière après Ariane Mnouchkine ?
Mais je lui ai trouvé de l'honnêteté à ce film. Il est rondement mené, il n'y a pas un temps mort, la musique est entraînante, les décors et les costumes sont très soignés. Fabrice Lucchini y est assez sobre, même si son personnage prête au ridicule. Molière y est à la fois cet Ecrivain qui ne rêvait que de tragédie, mais aussi un comédien, un coquin, un séducteur, un peu cabotin... Le film ressuscite un Molière dans sa prime jeunesse, en créant une histoire dans l'histoire (M. Jourdain, le héros du Bourgeois Gentilhomme est ici le second grand rôle du film, un bourgeois désirant séduire une marquise, et doté d'une épouse pleine de bon sens, à la fois romantique et visionnaire...
En somme, Laurent Tirard imagine que durant ce temps vécu chez M. Jourdain, Molière fait ses armes de futur auteur... Il égratigne nos moeurs au passage (le fils de Dorante, qui se pique de commerce, énonce le principe des délocalisations avec un naturel confondant - comme l'aurait fait Molière...)
Il me semble avoir relevé quelques clins d'oeil au Molière de Mnouchkine, même si Laurent Tirard privilégie un autre aspect. Il y a la scène où Molière joue la tragédie et se ramasse des pommes pourries, avant l'arrivée des huissiers. Et la visite à Mme Jourdain, agonisante, rappelle la mort de la mère de Molière, chez Mnouchkine. Les comédiennes qui entouraient Molière sont bien là, Madeleine Béjart, Catherine de Brie, Marquise du Parc... C'est un peu comme si ce film devenait un hommage à la fois au tragédien - enfin... A l'auteur comique... Et à Mnouchkine, la Dame du Théâtre du Soleil.
Ce n'est pas plus osé finalement que Shakespeare in Love, mais cela a eu moins de retentissement... Et deux étoiles seulement dans la critique. Pourquoi ? Peut-être parce que les moyens ne sont pas ceux de Hollywood? Qu'il ne s'agit que de cinéma français... Et pourtant... Cela peut sembler périlleux de s'attaquer à nouveau à Molière, et pourtant !